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Le Hatha Yoga que je pratique et que j’enseigne

  • Āsana : plus qu’une posture

Bienvenu.e.s dans mon espace dédié au yoga, un chemin que j’ai choisi d’explorer et de partager. Pourquoi ce nom de site “Entrez-en-Asana”? S’il est clair qu’il s’agit d’une invitation à découvrir le yoga comme je le vis, c’est aussi une formulation qui en condense la philosophie. Ce nom, on le verra, souligne que le yoga, ici, va au-delà d’une simple série de postures physiques ; il représente plutôt un cheminement vers une expérience intérieure.

D’abord, āsana – un terme sanskrit signifiant littéralement « le fait de s’asseoir » ou bien la « manière d’être assis » – désigne plus généralement n’importe quelle posture de Yoga. Et cette notion va, cependant, au-delà de la seule posture physique. Ainsi, l’expression « entrer dans (une āsana) », qui suggère déjà l’existence d’un espace (façonné par une forme corporelle), se lit aussi comme une ouverture vers une expérience où l’on respire et expérimente une présence à soi inhabituelle. Nous verrons alors qu’entrer dans une āsana est bien plus que « prendre » une posture, c’est aussi et surtout entrer progressivement dans un état de conscience particulier.
Avant d’essayer d’en dire plus sur cette expérience, commençons par reconnaître le yoga comme une discipline, une exigence envers soi-même qui réclame engagement, régularité et persévérance. Et aussi effort : les postures deviennent des supports pour nous éprouver à nous-mêmes. C’est d’ailleurs par la rigueur de cette approche que peut s’opérer un véritable déplacement intérieur, essentiel pour vivre une expérience transformatrice. Les āsanas nous invitent alors à un engagement profond, tant corporel que mental. La pratique nous enseigne la patience, l’humilité, et nous guide vers une stabilité émotionnelle dans notre quotidien, reflétant ainsi les fondements d’une assise stable dans la vie, tout comme dans l’āsana.

C’est pourquoi la pratique du yoga est difficilement classable, ni même ne se laisse aisément réduire à un simple résumé. Nous touchons et cultivons des aspects essentiels et enrichissants de l’expérience humaine. À l’image de la géologie, le yoga est un peu comme l’étude des sédiments : une exploration des strates de notre être, chacune se superposant à la précédente pour former un tout complexe et intégré.  

  • Yoga et humanisme

Chaque enseignant de yoga apporte sa propre couleur à cette discipline, car elle est façonnée par son parcours individuel unique.
Dans ma pratique, par exemple, je trouve un écho profond dans les mots de l’anthropologue : “Rien d’humain ne m’est étranger !” Car chaque élève que je rencontre m’apporte une nouvelle perspective sur la richesse et la diversité de l’expérience humaine. Je vois le yoga comme une expression de notre humanité, se révélant dans nos gestes, nos souffles, nos voix, et même dans nos silences.
Dans mes cours et, en particulier lors de mes stages, j’explore le yoga non seulement comme une pratique physique, mais également comme un espace sacré où le corps, rendu sensible et réceptif, devient un instrument d’écoute. Poésies, philosophies, réflexions deviennent des ferments naturels d’éveil, de curiosité et de compréhension de soi et du monde. Se révélant différemment dans une pratique où notre attention est aiguisée par une conscience corporelle et une conscience du souffle, la sagesse des mots et des idées résonne plus profondément en soi, enrichissant ainsi la pratique du yoga d’une dimension intellectuelle et émotionnelle. Le mot yoga, dont les racines remontent entre le XVe et le Xe siècle avant J.-C., n’était pas initialement employé dans le sens de discipline spirituelle que nous lui connaissons aujourd’hui, mais plutôt en relation avec l’idée d’attelage. Cette origine étymologique est au cœur de la plupart de mes propositions de stages : l’attelage ne se limite pas à la classique union du corps et de l’esprit, mais s’étend aussi à l’intégration des pratiques physiques à des contenus culturels. Ainsi, le yoga se révèle non seulement comme une pratique corporelle, mais également comme un chemin vers une compréhension plus profonde de notre être et du monde qui nous entoure, en écho à cette notion ancestrale d’harmonie.   

  • Harmonie corporelle et mentale

Mon approche se veut également un équilibre entre les enseignements traditionnels et les perspectives modernes. Pour naviguer entre ces traditions et leurs adaptations contemporaines, le discernement, un pilier de la pensée bouddhiste, est essentiel. Cela permet de cultiver une pratique authentique, sans illusions, nourrie par la recherche d’une relation juste aux traditions (sans en être subjugué), enrichies des approches modernes issues aussi bien de l’anatomie que des neurosciences.

Sur un plan postural, l’accent est placé, avant tout, sur le positionnement et la stabilité du bassin, indissociable de la tonicité, de la vitalité des jambes et de la qualité de la flexion de hanche; puis, vient la compréhension juste de l’interaction entre la ceinture scapulaire et la tenue des cervicales. L’ensemble visant la recherche d’un aplomb corporel, apte à accueillir et favoriser le souffle. Les techniques de relaxations étant également à l’honneur en fin de séance, l’articulation de ces approches donne intimement à comprendre cette citation du grand maître de yoga B.K.S. Iyengar : « Partout où l’espace et l’immobilité sont crées, l’énergie circule. »
Un autre aspect essentiel de la pratique est de développer une carte sensible du corps. Ce processus dépasse la simple compréhension anatomique pour entrer dans un domaine d’expérience personnelle, où nous construisons et ajustons continuellement notre représentation corporelle. Cette construction est guidée par nos sensations internes, ainsi que par les observations et corrections externes, enrichissant ainsi notre conscience et notre compréhension de l’alignement et de l’équilibre entre le corps et l’esprit. C’est en écoutant attentivement ces retours, en les intégrant dans notre pratique, que nous apprenons à ajuster nos postures, à reconnaître nos limites.

Le yoga que j’enseigne est avant tout fonctionnel, s’adressant à la fois au corps et à l’esprit : ma démarche – je l’ai dit – se manifeste par un travail attentif de prise de conscience corporelle, d’ajustements précis et parfois de restauration de certaines mobilités. Elle implique une compréhension intériorisée de la biomécanique, permettant à chacun de déployer son plein potentiel de mouvement dans la vie de tous les jours. Dans cette démarche, le yoga dépasse la seule dimension physique mais se distingue aussi nettement d’une quête spirituelle factice et fantasmée, éloignée des illusions simplistes et des apparences. Il devient alors fondamental, selon moi, de reconnaître la délicate frontière entre le yoga, envisagé comme un chemin de guérison et de transformation, et le danger de le convertir en un instrument d’exigence personnelle obsessionnelle, de narcissisme, et de quête illusoire de puissance et d’immortalité. Le terme grec ancien pharmakon, qui signifie simultanément remède et poison, illustre parfaitement cette dualité. Nombreux sont les pratiquants et les pratiquantes qui privilégient des formes de yoga particulièrement intenses, rigides ou performatives. Toutefois, lorsque la pratique du yoga s’éloigne de sa dimension méditative et introspective, et néglige l’engagement vers la connaissance de soi (svâdhyâya) ainsi que le discernement (vidyâ) qui la questionne et l’éclaire, elle devient subrepticement une extension de nos conflits internes et incarne alors cette tendance inconsciente à refuser de savoir (dvesa). Et le remède devient ainsi poison.   

  • Etats de conscience non ordinaires : le yoga, entre corps et conscience.

Cette recherche d’harmonie entre le corps et l’esprit ouvre la porte à une exploration plus profonde encore : celle des états de conscience non ordinaires. C’est dans ce voyage intérieur que la relation dynamique entre le physique et le spirituel se révèle pleinement. Au centre de la vie humaine, la dualité corps/esprit se manifeste constamment. D’un côté, le corps, un assemblage organique raffiné issu de l’évolution représente le socle biologique de notre existence. Constitué de systèmes et d’écosystèmes interdépendants et sophistiqués, il offre un équilibre délicat entre possibilités et limites. De l’autre, l’esprit, formant un substrat immatériel, qui se déploie avec une richesse exceptionnelle, s’étend à travers une grande diversité d’activités. L’union de ces deux ensembles – corps et esprit – forme le tissu complexe de notre existence. Cette symbiose, mêlant les processus biologiques à la finesse des pensées humaines, dévoile en elle-même la vie et ses mystères…
Alors, être en Yoga, ce n’est plus seulement pratiquer une discipline, c’est explorer des états particuliers dans un vaste continuum d’états de conscience.

De ce fait, le yoga est indissociable d’autres pratiques comme la méditation, l’hypnose ou la transe cognitive. Ces pratiques se complètent mutuellement, permettant au yoga de révéler toute sa dimension et d’atteindre son plein potentiel. Ainsi en va-t-il de mon enseignement de cette discipline. Pour reprendre les mots de mon maître de yoga, à qui je dois mon engagement dans ce chemin : 

« Vous découvrirez dans chaque posture, l’intensité dans l’action, autant que l’intensité dans le silence intérieur. 
Les yogis et les yoginis pratiquent cette connaissance de soi, appelée « l’ouverture » : à leur nature propre, et à autrui en même temps.
D’où, sans doute, ce bien-être ressenti à la fin des séances. »